L’effet de projecteur
Source: Pixabay Nous sommes le centre de notre monde, donc après tout pourquoi ne serions-nous pas celui des autres aussi ? C’est exactement cela l’effet de projecteur. Notre propension à penser que parce nous avons un bout de salade entre les dents, ou que nous portons une tenue au goût très discutable, alors tout le monde le remarquera et nous jugera. En gros, c’est notre capacité à se sentir remarqué par les autres davantage que cela ne se passe vraiment. Alors qu’en vérité… Les gens s’en moquent plutôt de nous, bien trop occupés à penser d’abord à leur propre nombril ou leurs sensations ! Au moins en jouant aux machines à sous, nous sommes certains du plaisir que nous ressentons et n’avons pas besoin de douter de la validation des autres. Celles-ci ne doivent pas cependant pas être utilisées comme échappatoires, il vaut mieux chercher de l’aide pour ce genre de situations. Cette théorie de l’effet de projecteur a été prouvée et vérifiée avec des conditions de tests, et donc il est plus que certain que nous surestimons souvent notre importance personnelle aux yeux des autres. Désolé, ou alors plutôt tant mieux en fait parfois non ?
Ce narcissisme que nous possédons tous
Pensons à cette réflexion de Eugène Labiche : «Un égoïste, c’est quelqu’un qui ne pense pas à moi.» Mais attendez, cela est vrai en fait ! Blague à part, nous pouvons tellement être inconsciemment convaincus que tout nous tourne autour, que nous pouvons arriver à rentrer dans une croyance toute particulière portant le nom mélodieux de «solipsisme», soit la propension à penser que notre réalité est la seule qui existe et qui soit indépendante de tout le reste. Avouons que cela nous traverse parfois l’esprit quand nous avons l’impression que la société et les gens que nous fréquentons sont des robots ou des animaux, tellement ceux-ci font preuve de temps en temps d’une bêtise incroyablement concevable…
Quelques exemples d’effets de projecteur :
- Nous avons changé de coiffure, mais personne ne le remarque. Quelle déception !
- Nous avons acheté ce superbe bracelet ou collier, et étonnamment nos amis ne nous questionnent pas dessus. Les goujats ! C’est pourtant dans le but d’être remarqué que nous le portons !
- Nous sommes sortis sans nous laver les dents. Nous pensons vraiment que beaucoup de gens l’ont compris. En vérité, bien peu en ont quelque chose à faire…
- Finalement, la timidité elle-même provient de l’effet de projecteur : nous pensons que les gens vont nous juger immédiatement dès qu’ils nous verront ou dès que nous nous exprimerions, mais si vous saviez à quel point nous sommes nombrilistes et nous ne vous écoutons limite même pas…
- Fait amusant : avec le biais égocentrique, nous pensons qu’à salaire égal avec autrui, notre rémunération est justifiée même si elle est objectivement exagérée. Alors que nous savons porter un recul sur celui de l’autre et nous sommes alors rationnels et objectifs à le trouver surestimé, ou pas en lien avec ses compétences.
Liens avec d’autres concepts psychologiques
Il est intéressant de se rendre compte que l’effet de projecteur est en fait une extension de plusieurs phénomènes psychologiques :
- L’ancrage et l’ajustement: Les individus utilisent leurs propres sentiments comme repère. Exemple : nous pensons que notre sensation d’anxiété est évidente pour les autres, et qu’ils vont en prendre compte.
- Le faux-consensus: les individus surestiment l’importance que leurs opinions, attitudes et comportements ont vis-à-vis des autres. Nous augmentons ainsi notre estime de nous sur de fausses bases. Illustration de l’effet de faux-consensus : dans une situation, la majorité des gens ont la même opinion, donc tout le monde a la même opinion. À l’inverse, la fausse perception d’unité nous fait sous-estimer cette fois-ci la mesure dans laquelle les autres partagent les même attitudes et comportements positifs que nous.
- Le biais «self-as-target»: le fait qu’un individu croit que les évènements sont dirigés de manière disproportionnée vers lui-même. Exemple : un élève avait un devoir à faire en classe et ne l’a pas fait correctement. Dans sa panique, il va penser que l’enseignant va le deviner et l’interroger juste parce qu’il a senti qu’il n’a pas bien fait cet exercice.
- L’illusion de la transparence: un exemple parlant : vous tapotez la mélodie de «joyeux anniversaire» sur une table avec vos doigts. Vous pensez qu’au moins la moitié des gens vont la reconnaître, alors qu’en vrai même pas 3 % ! Ou alors vous prenez la parole en public et pensez que votre anxiété est immédiatement perçue par l’ensemble de l’audience. À tort…
- L’effet du témoin: par exemple vous êtes dans une situation d’urgence potentielle, avec plusieurs personnes. Personne ne veut réagir de manière excessive. Au final, les gens se mettent à conclure que la situation ne mérite pas d’action rapide, voire pas d’action tout court, puisque tout le monde semble nonchalant face à ce problème ! Un cercle vicieux qui peut engendrer bien des ennuis en cascade derrière...
- L’effet d’autoréférence: notre capacité à faire référence à nous-même ou à parler de nous pour illustrer un sujet, ou en général. Avec parfois véritable économie d’humilité ou de modestie...